Lepaon dehors (et les autres aussi) !
Dans la crise de la CGT, il nous faut intervenir activement
11/12/2014
Quand l’affaire a éclaté, les collègues étaient partagés entre l’étonnement et l’indignation. Avec l’enchaînement des révélations, la stupeur a fait place à la colère, à la fois au sein des équipes militantes mais aussi chez les salariés du rang : après la « rénovation » du logement de fonction de Lepaon, après le « rafraichissement » de son bureau, voilà maintenant « l’indemnité de départ » !
L’affaire qui secoue la centrale de Montreuil va bien au-delà : c’est l’affaire de toute la CGT mais également de tout le syndicalisme. Elle met en lumière les pratiques des bureaucrates syndicaux et les fait apparaître pour ce qu’ils sont : une caste de privilégiés et une courroie de transmission des exigences du patronat et de la politique des gouvernements. Cette affaire, elle nous retombe également dessus, nous autres militants lutte de classe au sein de la CGT. En ce sens, pour que la crise nous soit profitable, il faut qu’on se donne les moyens d’y intervenir activement.
Cette crise est l’expression de luttes intra-bureaucratiques qui n’ont jamais cessé depuis le dernier congrès mais aussi le reflet de la crise que traverse de l’ensemble des médiations réformistes. Alors que certains ministres et amis de Gattaz cherchent ã « libérer les entreprises », le scandale tombe ã pic pour discréditer le syndicalisme. Mais pour les secteurs les plus lucides de la bourgeoisie, c’est une très mauvaise nouvelle. Soubie, l’ancien conseiller social de Sarkozy l’a redit : « personne n’a intérêt ã avoir une CGT affaiblie. Cela risque d’encourager des mouvements sociaux non contrôlés ».
C’est pour ces raisons que les militants lutte de classe au sein du monde syndical doivent donner de la voix. Mais si le NPA ne remplit pas ce rôle de catalyseur du ras-le-bol qui est sous-jacent, il y a fort ã parier que personne n’en prendra l’initiative à l’extrême gauche.
La question n’est pas d’exiger « dehors Lepaon ! », mais de débarquer l’ensemble de la caste qu’il représente, dans tous les organismes où ils servent d’interface avec le monde du travail. Cela implique également de défendre la perspective de la récupération de nos organisations syndicales pour les travailleurs, pour qu’elles soient au service de notre classe. Cela veut dire en finir avec la politique de « dialogue », dont la dernière expression en date est la fin négociée de 90.000 DP dans les PME. Pour en finir avec un syndicalisme de compromissions, il faut exiger que nos structures syndicales redeviennent parfaitement indépendantes de l’Etat. Pour en finir avec un syndicalisme de privilèges, aucun dirigeant ne saurait rester plus de deux ans sans revenir ã son poste de travail.
Bien entendu, nous ne pensons pas qu’il soit possible de se débarrasser, demain, de ce qui apparaît de plus en plus comme une « aristocratie syndicale » aux yeux des travailleurs. Ce qui est sûr, en revanche, pour nous, militants révolutionnaires au sein de la Conf, c’est qu’il est plus nécessaire que jamais et, aujourd’hui, possible, d’avancer, sur ces questions. Ce sont autant de positions essentielles pour reconstruire la confiance de nos collègues en leurs propres forces et pour proposer des perspectives, à la fois pour les batailles qui seront à livrer demain, contre les attaques du gouvernement et l’offensive du patronat, mais aussi en vue du Congrès de 2016. Si on prépare cette perspective dès maintenant, alors peut-être sera-t-il possible de porter jusqu’au bout, cette fois-ci, une position lutte de classe et anti-dialogue social au sein du syndicat.
Relayer cette perspective au sein des équipes syndicales dans les entreprises serait un premier pas. On pourrait penser également ã une prise de position commune des militant-e-s les plus connu-e-s qui ont été au cœur des luttes contre les licenciements et fermetures en 2008-2010. Cela pourrait aller de concert ã une campagne plus globale qui pourrait être proposée à l’ensemble des organisations de la gauche radicale et de l’extrême gauche qui défendent des positions lutte de classe.
Ce serait un coin enfoncé entre la traditionnelle séparation du syndical et du politique qui, en dernier lieu, fait le jeu de la politique… pro-patronale et pro-gouvernementale du dialogue social. Ce serait un instrument pour se donner un profil radicalement alternatif au sein d’un mouvement ouvrier que les directions réformistes continuent, aujourd’hui, ã diriger, mais qui peinent de plus en plus ã être audibles. Ce combat devrait être mené de façon coordonnée par l’ensemble des camarades du parti ayant une intervention et une implantation syndicale, indépendamment de notre encartement.
Vincent Duse (NPA-68, CGT PSA Mulhouse, CCR-P3)